A l’initiative de l’association « Les forges du Lion » affiliée à l’IRAP, près de 70 pratiquants de toute la France et d’ailleurs se sont réunis à Belfort autour du jeune Maître ShenSi pour le traditionnel stage d’été de l’IRAP.
La première semaine
Tandis qu’un petit groupe de huit personnes se forme autour de Sujie (la mère du jeune maître et disciple émérite du grand-maître Wang Xian) et travaille la forme huit et quelques qi qong de base, le plus grand nombre se rassemble autour de Shen Si pour travailler la forme longue « Laojia yi lu » (littéralement « charpente ancienne »).
A la suite des stages précédents, le jeune maître affiche rapidement l’ambition d’approfondir un peu plus la compréhension interne du Qi (énergie) à travers le travail de la forme et de ses applications martiales. Cependant, fidèle à son intention de satisfaire le plus grand nombre et à sa capacité de s’adapter au mieux à son public, il revient vite à un travail plus axé sur la mémorisation et l’ancrage des points clés de la pratique en raison de la grande hétérogénéité du groupe. Chaque détail a son importance et ce travail est l’occasion pour chacun d’explorer à nouveau les fondamentaux de notre pratique et de renouveler en lui-même « l’esprit du débutant », signe véritable d’humilité et gage sincère de progression.
Le groupe entrainé par Sujie travaille tout particulièrement les Zhangs et prolonge chaque jour un peu plus les séances de qi qong qui alternent avec le travail de la forme. Les visages apaisés et ravis des participants à l’issue des séances témoignent de la sérénité profonde qui émerge d‘une telle pratique. Elle semble être un point de départ indispensable à la compréhension du relâchement tant mental que physique qui est une clé majeure du taichi chuan.
Si l’absence de Phillipe Delage nous attriste beaucoup, il est quand même un peu là avec nous tous à travers la présence précieuse de Brigitte qui le représente. Alain Caudine, et quelques autres plus aguerris dans l’art, secondent discrètement le maître et les échanges porteurs se multiplient dans le groupe permettant d’élever un peu plus à chaque stage le niveau de chacun. L’équipe des « Forges du lion » est sur la brêche toute la semaine pour servir sans interruption avec entrain et bonne humeur, les boissons chaudes et froides, les fruits secs et frais, participant au bien-être de tous et à l’ambiance très conviviale de cette très bonne semaine. Quelques pauses se prolongent nourries de rires et de rencontres.
Température avoisinant les 30-35° – Nelson l’assistant du maître devrait se nourrir un peu plus substantiellement : il n’a même pas la peau sur les os ! – intérêt de la presse locale qui dépêche un reporter et qui fait une de ses unes de la semaine – Les magnifiques t-Shirt siglés IRAP se vendent comme des petits pains –
La deuxième semaine
Le groupe s’est éclairci mais compte encore près d’une cinquantaine de personnes. C’est la forme du sabre qui a été choisie : une forme courte qui permet de consacrer un peu du temps de l’après-midi au travail des tuishous et des applications martiales. Shen Si insiste sur l’aspect démonstratif de cette arme. Il partage avec son public quelques considérations sur l’évolution de l’art et de la place particulière des armes dans la pratique. Si la dimension martiale reste très présente, la recherche esthétique doit guider le mouvement et la recherche du pratiquant. La forme est particulièrement tonique : les sauts et les sorties de forces s’enchainent à un rythme assez élevé. Quelques pratiquants parmi les plus anciens du groupe connaissent trop peu l’enchainement et préfèrent rejoindre le groupe animé par Sujie qui travaille la mémorisation. Comme d’habitude avec Sujie, le travail est rigoureux et ne s’embarrasse pas de longues explications. A chaque fois qu’un nouveau mouvement est démontré, il est répété systématiquement plusieurs fois , puis corrigé, puis répété de nouveau et la forme revue depuis le début jusqu’à ce nouveau point… et ainsi de suite jusqu’à la fin de la semaine. Avec la chaleur environnante qui n’a pas faibli, la semaine sous la férule de Sujie prend indéniablement des accents chinois… un petit air de Chenjiagou souffle sur le groupe.
Le travail des tuishous et des applications martiales permet de valider la justesse de la pratique de la forme et de mesurer le chemin qu’il reste à parcourir pour chacun : ce mouvement dont on se satisfait dans le tao lu en se disant « qu’on le tient enfin » ne bouscule aucun adversaire sitôt qu’on essaie d’en tirer une application martiale… long chemin d’humilité ! Le maître n’est pas avare de conseils et il s’attarde auprès des uns et des autres pour aider à la compréhension d’un geste, à la position d’un pied, d’une main, la direction d’un regard… Il ne rechigne pas au contact et permet au plus grand nombre d’éprouver sa douceur et sa fluidité dans l’échange. On a l’impression de glisser sur lui sans jamais être véritablement contraint et au moment ou il l’a choisi, une application martiale jaillit avec force et soudaineté sans avoir même été pressentie. On sait alors qu’on est bien là en face d’un héritier légitime de l’enseignement de Wang Xi’an dont l’art du tuishou est si réputé. Clément qui assure brillamment la traduction pendant les deux semaines, jonglant entre l’anglais et le chinois en gardera certainement plus que tous les autres pratiquants le souvenir : ayant accepté de servir de partenaire au maître il goûte de bonne grâce à plusieurs reprises la fermeté du sol du gymnase sous les « oooooh » admiratifs et un peu inquiets du public.
En marge des cours, se tient l’Assemblée de l’ IRAP qui permet d’exprimer librement les espoirs, les projets les envies des uns et des autres et qui témoigne d’un beau dynamisme à l’heure ou le jeune maître semble imposer sans conteste, la sincérité et l’efficience de sa pédagogie à la suite de Grand Maître Wang Xi’an.
Température avoisinant les 30-35° – apéro musical grâce aux amis Seb (piano) Julien (sax) et Pascalinou en guest-star (à l’harmonica) Il reste encore un peu de bière fraîche dans le frigo, Nelson serait bien inspiré d’en boire une gorgée – Toute notre amitié à David Kempf et son équipe pour leur engagement auprès de l’IRAP et l’aide fournie pour la rédaction de cet article.